C’est le temps du grand ménage

Pauvre Canadien, il termine sa saison avec une lourde défaite qui pèsera sur ses frêles épaules estivales. C’est le seul désavantage de participer aux séries : on gagne la coupe ou on perd son dernier match de la saison. Mardi soir, pendant un très court instant, Canadien gagnait illégalement le match, et la plupart croyaient à la victoire et à une septième joute chez Caroline. Soixante minutes ont passé, et le pointage ne favorisait ni Canadien ni Caroline. La prolongation s’annonçait excitante et enlevante, et, pour encourager votre équipe, le Sportnographe s’est même payé une tournée de bon vieux Jock. Une minute dix-neuf secondes s’est écoulée, la multitude se tut, et votre équipe fut officiellement en vacances. La malchance avait encore frappé le Tricolore. À Montréal, dès le troisième affrontement, Caroline a réussi à lui subtiliser le momentum et les buts chanceux. Pauvre Canadien, la chance s’était envolée, volatilisée. Canadien devait maintenant déjouer le gardien sans « garbage goal », et, bien qu’il ait travaillé fort dans le coin, il a échoué. Son talent se limitait peut-être là, aux buts sans finesse et aux impondérables. Les partisans avaient beau rêver en additionnant et en soustrayant des chiffres pour donner le beau total de 93, année de la dernière coupe Stanley du bleu-blanc-rouge, et les joueurs pouvaient toujours espérer ; le titre de champion de la grande ligue ne collait pas vraiment à la peau de Canadien. Pouvait-on vraiment gagner la coupe ? Bien que Bulis ait joué en avantage numérique, bien que le premier trio ait été Ryder, Bégin et Higgins, bien que Kovalev ait terminé au soixante-sixième rang des meilleurs pointeurs, il manquait à Canadien la graine du champion, celle qui compte des buts. Statistiquement parlant, Canadien se retrouvait souvent désavantagé. Une triste leçon pour nos jeunes : le coeur ne suffit pas toujours pour atteindre ses rêves.

Le Sportnographe se retrouve maintenant sans sujet principal, sans Canadien. La saison estivale sera longue, mais peut-être palpitante. Car, comme vous le savez, qui dit fin de saison dit inévitablement nouveau départ. C’est maintenant le temps de faire le grand ménage du printemps. On lave nos fenêtres et on change d’air. On nettoie sa maison et on se débarrasse de nos vieilles affaires. On frotte et on repart à neuf. Parfois, paresseux, on fait un petit ménage. Mais, il y a des années où, lorsque la forme le permet, on sort le grand ménage. Et, cette année, le Sportnographe propose à Canadien de frotter très fort. En échangeant José Théodore, Robert Gainey a pris un peu d’avance, mais d’autres échanges s’imposent. Cristobal Huet devrait théoriquement signer un nouveau contrat, mais, devant lui, les choses pourraient changer. Enfin, espérons-le. Cependant, si Huet exige un salaire à la Théodore, il faudrait alors le jumeler à un joueur échangeable.

Canadien se doit d’apporter du sang nouveau, de la graine de champion à son alignement. Pour gagner, je vous le rappelle, il faut compter plus de buts que son adversaire et, pour enfiler l’aiguille, il faut d’agiles joueurs qui ne manquent pas la cible, des compteurs naturels qui ne lancent pas la rondelle sur le gardien ou dans la baie vitrée. Mike Ribeiro a peut-être les mains agiles, mais ses tirs s’échouaient toujours sur le gardien. De plus, puisque sa description de tâches l’exige, Mike a fabriqué quelques jeux, mais il n’a pas profité des occasions qui s’offraient à lui. Je vous connais lecteur, vous allez répliquer en m’annonçant que le petit Mike a créé beaucoup de retours de lancers qui auraient pu être récupérés par un vrai compteur. Or, lorsque tu peux marquer dans un filet désert, pourquoi utiliser la technique du retour de lancers, me l’expliquerez-vous un jour ?

Jan Bulis a peut-être la jambe rapide, mais le coin de la patinoire l’apeure. Avec le deuxième rang du Canadien pour la précision de ses lancers – ici, les statistiques ne comptent pas les lancers qui ne touchent pas la cible, mais bon -, Jan a sûrement réussi à vous impressionner à quelques reprises cette année, mais la crainte d’une mise en échec de l’adversaire le fait souvent rebrousser chemin. Il n’y a aucun doute que, dans une ligue amicale, Bulis dominerait. Or, la grande ligue encourage la bonne mise en échec. Bulis n’a plus de contrat, alors le Sportnographe suggère à Canadien de laisser ça comme ça.

Quoiqu’il ait plus souvent tenté de couper vers le centre, Richard Zednik se désamorce trop souvent derrière le filet de l’adversaire. Une main de Richard délaisse son bâton, elle l’incline et l’attire ensuite vers la zone interdite aux gardiens de but. Certains diront que Richard retrouve tranquillement sa confiance, mais la plupart se débarrasseraient de lui, volontiers. Zednik joue trop souvent seulement en séries éliminatoires et il n’y voit pas de problèmes.

Michael Ryder a sans doute la gâchette facile, mais, sans son atout précieux, le « garbage goal », il ne va nulle part. Michael est vraisemblablement le seul marqueur de 30 buts chez Canadien, mais il ne sera malheureusement jamais un grand joueur. Ryder a sans doute une valeur marchande intéressante pour une équipe qui ne l’aurait pas vu jouer et qui aurait observé uniquement les statistiques du jeune joueur.

En l’absence de Saku Koivu, Radek Bonk a un brin mieux paru, mais une paye de deux millions pour effectuer six gros buts, ce n’est pas la meilleure aubaine sur le marché. Le Sportnographe recommande à Canadien de l’offrir dans un paquet-surprise bien emballé à une équipe lointaine. Niklas Sundstrom, l’homme aux petites choses subtiles, contractuellement parlant, n’est plus lié à Canadien, et la référence en sport aimerait mieux ne pas l’encourager l’année prochaine. Niklas serait beaucoup plus inintéressant avec un autre uniforme, et tout le monde serait content.

Alex Kovalev. Je vous entends déjà au loin : ne touche pas à mon Koko, c’est le meilleur joueur. Le grand Alex a effectivement plus de talent que la majorité de ses coéquipiers ; il contrôle la rondelle, il lance au filet et crée des occasions. Mais Alex Kovalev ne portera jamais une équipe sur ses épaules russes… S’il vaut un jeune compteur déterminé, allons-y…

Lorsque son bâton de verre ne brise pas, Sheldon Souray a un gros lancer. Or, Sheldon a une grosse lacune, il aime énormément le café, et ses adversaires le savent. À des moments plutôt inappropriés, les attaquants adverses lui servent gentiment de belles tasses de café. Un échange amènerait Sourray chez un compétiteur, et Canadien pourrait alors profiter de sa faiblesse pour le café bien moulu et se débarrasser de ses bâtons vert fluo.

La saison des BBQ s’est amorcée, et Craig Rivet est un atout important en cette période estivale. Or, Craig reçoit chaque année un trop bon salaire pour son talent trop limité. Trouver un autre as du BBQ à un moindre coût devrait être possible, mais, le plus gros problème, c’est de trouver une équipe qui s’intéresserait aux « chop » de porc à Rivet. Oui, Craig Rivet s’est amélioré. Il effectue maintenant les sorties de zone et il joue en créant beaucoup moins d’erreurs que jadis. Cependant, bien qu’il soit un chef hors pair, Rivet ne sera jamais un quart-arrière, et les talents de cuistot ne permettent pas de remporter une coupe Stanley.

En résumé, le Sportnographe propose d’échanger ou de se débarrasser de Ribeiro, Bulis, Zednik, Ryder, Bonk, Sundstrom, Souray, Rivet et peut-être Kovalev. Canadien doit absolument signer Bouillon et prendre soin de ses jeunes joueurs. Vous allez probablement me mentionner que tous les joueurs échangeables n’ont pas une grande valeur marchande, et vous avez malheureusement raison. On peut toujours ajouter Markov à la liste… À suivre…