Huit buts, huit ailes, une défaite et un pfff

Pour commencer par la fin, je débuterai mon texte ainsi : Canadien ne fera pas les séries cette année, et, ici, fidèle lecteur, remarquez que le verbe n’est malencontreusement pas au conditionnel. Comme vous le savez, tout est une question de temps. Il y a le temps des verbes, le temps qu’il fait, le temps d’une paix et le temps qui passe, et j’en passe mes amis, j’en passe. Car, tout a un début et une fin et, de plus, imaginez, tout est dans tout. En ce moment, vous vous dites sûrement : chapeau Steve, mais où t’en vas-tu ? C’est pour cette raison que Steve a pris l’initiative, et ça, sans consulter ses collègues, de débuter par la fin afin de vous éviter de vous perdre dans mes mots formés de lettres tapées de mes propres doigts – la technologie, contrairement à Canadien, ne cessera jamais de m’épater. Voilà, c’était ma conclusion, et, maintenant, si vous le voulez bien, passons à Canadien – et dire qu’il n’y a pas si longtemps j’aurais dit : passons aux choses sérieuses. Il faut croire que les temps changent…

Cher liseur, rappelez-vous, Canadien allait si bien, il avait plus que le vent dans les cheveux, il l’avait dans le dos et dans les voiles. Les experts revoyaient leurs prédictions professionnelles, la une des quotidiens titrait « ça sent la coupe » et, comme toujours, les partisans y croyaient. Or, aujourd’hui, soit le mât est brisé, soit le vent s’est rebellé contre votre équipe ou bien Canadien a choisi délibérément d’aller face au vent. Drôle de choix que le dernier me direz-vous, peut-être. Toutefois, ici, au Sportnographe, comme nous pensons presque par nous-mêmes, nous présumons que Robert a choisi d’y aller à contre sens et, contre toute attente, de foncer droit devant avec le pas de toupet virevoltant dans la tempête (le nous précédant est utilisé sans l’accord de l’ensemble de la direction, mais le Baron m’a personnellement confirmé la stratégie lors d’un appel téléphonique des plus sérieux).

Selon une source bien installée, Robert aurait pris la décision de changer de cap un certain matin, que plusieurs experts nomment maintenant LE 23 décembre. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler de ce 23 décembre, mais la preuve est dans les statistiques. Vous vous demandez, tous et toutes, mais pourquoi avoir pris une telle décision alors que les choses allaient si bien et que la ville était hockey comme ils disent. Néanmoins, avant de vous répondre et, évidemment, si vous me le permettez bien (sinon libre à vous de sauter ce paragraphe admettons que vous vous sentiez déjà dans le gras du sujet), je passerais à mon introduction.

Sherbrooke – hier soir, alors qu’une escouade sherbrookoise se préparait à partir pour le Boston, Canadien a subi une autre défaite crève-cœur contre une des meilleures formations de la grande ligue, soit le Buffalo. Par contre, Canadien ne fut point cheap en ce vendredi et il a offert une belle et peut-être bonne tournée d’ailes Buffalo à ses partisans. Non, ce n’est pas une victoire, mais ça permet de dévorer un peu le Buffalo sans trop d’efforts. Fâcheusement, qui dit tournée d’ailes ne crie pas inéluctablement victoire. Car, comme on vous le répète souvent, pour gagner, Canadien doit compter plus de buts que son adversaire, et ce ne fut point le cas. Faut-il alors pointer en direction du gardien, demanderont les gens ayant le droit de questionner en direct Guy Carbonneau et son équipe ? Cependant, une question n’entraîne pas toujours une réponse, mais, souvent, elle en amène une autre. La preuve, l’entraîneur a répondu quelque chose comme : pfff, passe à une autre question. Ici, après avoir analysé la réaction au ralenti – ce qui donnait quelque chose comme pppffffffffff, nous déclarons sans aucune hésitation que tout se situe dans le dit pfff. C’est un pfff important. Huit buts, huit ailes, une défaite, un pfff. Et, comme vous le savez, le hockey se joue et se gagne avec de petites choses, des détails…

Tout d’abord (je dois admettre que cet adverbe peut faire peur à ce moment-ci, mais je me le permets puisque l’introduction vient tout juste de se terminer), pour comprendre la stratégie à Robert, car, oui, comme vous vous en doutez, derrière chaque homme, il y a une femme et une stratégie, il faut analyser et décortiquer les petites choses qui forment le tout. Par exemple (ici, ceux et celles qui ont sauté l’introduction s’interrogeront peut-être sur la suite, mais ce fut votre choix et pas le mien), un pfff peut dévoiler une quantité d’émotions et d’informations. Au ralenti, avec un œil attentif et positif, vous remarquerez toute la confiance qui émergeait du dit pppffffffffff. C’était comme si l’homme derrière la belle cravate bien tendue connaissait la suite, comme s’il visionnait l’avenir, rien de moins. Ce pfff sera un jour célèbre… On vous le montrera et remontrera, à l’envers et à l’endroit, au ralenti et en accéléré. Car, oui, Robert a une stratégie, et elle est maintenant claire. Je pourrais m’arrêter ici, mais, puisque mon nombre de mots par année est en déficit en ce moment et que mes doigts ont encore le rythme sur ma dactylo technologique, je continuerai un peu, juste un peu. Si vous en avez assez, je vous comprendrais, mais le meilleur est avenir…

Huit buts, huit ailes ; une défaite, un pfff. Le meilleur est avenir, ne l’oubliez pas. Robert le sait sans doute, Guy patine sans patin avec le présent et le partisan le subit sur son banc sans lendemain et chèrement payé, malheureusement. Or, lorsque Canadien atteindra son objectif d’obtenir le premier choix du repêchage qui s’annonce des plus moyens pour le dépisteur expert, souvenez-vous de ce pfff rempli d’espoirs… Un premier choix au repêchage, c’est presque possible si Canadien se force et si la stratégie est bien déployée. Le problème n’est pas dans le filet, c’est plutôt la solution qui s’y trouve. Pourquoi ? Comment est-ce possible ? Je vous le dis, tout est dans le pfff. Vous clamerez haut et fort que je n’ai point écouté la fin de l’entrevue pour affirmer une telle chose, mais, ici, nous restons positifs et j’avais vraiment hâte d’écrire un article, si vous me permettez de nommer l’ensemble de mes mots ainsi, bien sûr.

Depuis le 23 décembre (c’est la dernière fois que je l’utilise celle-là, promis), tout un chacun se décourage de Canadien. Or, vous devriez plutôt admirer le travail et le respect du plan de match de cette équipe. Un beau matin, Robert se lève et il a une vision. Laquelle, nous ne pouvons encore vous la confirmer avec précision, mais, ce matin-là, il sait et il voit la coupe au loin. Il convoque alors ses gardiens, il leur demande de baisser leur standard beaucoup trop haut pour la stratégie, et vous connaissez la suite. Robert voit loin.

Pendant ce temps, Canadien et ses poulains se forment le caractère, ils s’améliorent et ils apprennent. Car, oui, c’est comme ça dans la vie, on apprend souvent plus de nos erreurs et de nos défaites que de nos succès. Dans la vie comme au hockey, Robert s’est levé un matin et il a vu et compris. L’année prochaine sera la bonne.
Cependant, ne dites rien aux joueurs, car ils ne sont pas au courant du plan à long terme. Les gardiens ont su tenir le secret, je me fie sur vous. Huit buts, huit ailes, un pfff et un article. Pensez-y.